Les besoins en rénovations d’un parc immobilier vieillissant
S’il est un secteur de notre économie au sujet duquel les évolutions technologiques sont rarement évoquées, sans nul doute que le secteur de la construction viendrait en première place. Et pourtant ! Nombreuses sont les avancées technologiques dans ce secteur, tout particulièrement en matière d’accroissement de l’efficience énergétique, du développement du recours aux énergies renouvelables, et de meilleures réponses aux préoccupations environnementales. Le parc immobilier existant, érigé majoritairement au cours des deux derniers siècles, constitue le socle de l’offre du marché. Conçu et construit sans préoccupation de développement durable ou d’efficience énergétique, notre parc immobilier devient peu à peu obsolète au gré de chaque nouvelle et inéluctable augmentation des exigences dans ce domaine. Cette situation est préoccupante, non seulement pour l’ampleur du coût des travaux de rénovation que les progrès techniques en matière de gestion rationnelle de l’énergie imposent, mais également pour le temps considérable que requièrent ces rénovations.
Ces enjeux ne peuvent aujourd’hui plus être passés sous silence, ni rester sans impact sur les conclusions d’une expertise immobilière professionnelle, tant l’exigence de rentabilité est incontournable pour la résolution de cette équation très complexe. Ce d’autant que le législateur s’est emparé de longue date de la question sensible des possibilités de répercussion du coût des travaux de rénovation sur les loyers, fondée sur l’OBLF fédérale (Ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme 07.07.1990). Plusieurs cantons se sont ultérieurement dotés de textes poursuivant le même objectif, que ce soit la LDTR genevoise ou la L3PL vaudoise. Nous développerons cette dernière afin d’illustrer la large palette de facteurs déterminant la rentabilité financière d’une rénovation énergétique d’un bâtiment.
Premier critère issu de l’OBLF, seuls les travaux générant une amélioration de la chose louée pourront être répercutés en hausse de loyers, alors que les purs travaux d’entretien de l’immeuble ne le pourront pas. La part à plus-value est dans un premier temps estimée par l’autorité compétente en pourcentage du coût total des travaux, hors coûts d’améliorations énergétiques créant une plus-value.
Second critère clé, le Département en charge de l’application de la L3PL déterminera les revenus locatifs objectifs de l’immeuble sur la base de l’estimation immobilière d’une valeur objective de l’immeuble, multiplié par un taux technique en pourcent, généralement de 3,5% environ. La valeur objective est usuellement retenue en tant que cumul du montant de la couverture d’assurance ECA, additionné de la valeur estimée du terrain, des aménagements extérieurs et des frais secondaires de construction, l’ensemble en valeur à neuf.
Afin d’atteindre son objectif de contrôle des loyers après travaux, l’autorité compétente statuera sur les augmentations de loyers futurs. Pour se faire elle divisera le montant de l’état locatif avant travaux par le montant des revenus objectifs de l’immeuble, définissant ainsi un ratio en pourcent. L’écart avec la part des travaux apportant une amélioration à la chose louée déterminera le pourcentage de l’état locatif qui ne pourra pas être augmenté après l’achèvement de ces travaux. L’exemple suivant illustre le propos :
1) Détermination de la Valeur Objective | |||
Montant | Montant | ||
CFC0 | 1 200 000 | 1 200 000 | |
CFC2 | 2 000 000 | 2 000 000 | |
Vétusté | -150 000 | ||
Obsolescence | -50 000 | ||
CFC4 | 120 000 | 120 000 | |
CFC5 | 160 000 | 160 000 | |
Total valeur à neuf | 3 480 000 | Total valeur objective | 3 280 000 |
2) Détermination du ratio des revenus avant travaux | ||
Revenus locatifs Objectifs au taux technique | 3 280 000 x 3,50% | 114 800 CHF/an |
Revenus locatifs Effectifs selon l'état locatif avant travaux | 143 000 CHF/an | |
Ratio (Revenus Effectifs / Revenus Objectifs) | 143 000 / 114 800 | 125% |
Part du coût des travaux d'entretien sans amélioration | 70% | |
Quote-part des travaux d'entretien sans plus-value | 125% - 70% | 55% |
Quote-part résultante des travaux d'entretien avec plus-value | 100% - 55% | 45% |
100% |
3) Détermination de la répercussion du coût des travaux en hausses de loyers | ||||
3)a EL de l'immeuble avant les travaux | 143 000 | |||
3)b Répercussion du coût des travaux en hausses de loyers | ||||
Vétusté Travaux d'entretien sans plus-value | 150 000 x 55% | 81 847 | pour mémoire | |
Vétusté Travaux d'entretien avec plus-value | 150 000 x 45% | 68 153 | x 3,50% | 2 385 |
Obsolescence Travaux d'amélioration avec plus-value | 50 000 | x 3,50% | 1 750 | |
Total des travaux d'entretien et d'amélioration | 200 000 | Hausses | 4 135 | |
3)c Revenus locatifs de l'immeuble après les travaux | Hausses | 2,9% | 147 135 | |
Rentabilité brute de l'immeuble avant travaux | 143 000 / 3 280 000 | 4,4% | ||
Rentabilité brute de l'immeuble après travaux | 147 135 / 3 480 000 | 4,2% | ||
Rentabilité brute des travaux | 4 135 / 200 000 | 2,1% |
Même si les modalités d’application peuvent sembler simples dans les termes, on s’apercevra vite que l’estimation de multiples critères et facteurs déterminants peut devenir complexe et ardue.
Pour un propriétaire immobilier, trouver la stratégie adéquate de rénovation de son patrimoine immobilier locatif se révèle donc être d’une grande complexité afin que tous les critères de succès, particulièrement financiers, soient atteints. Le recours à des compétences spécialisées en la matière, en amont du processus de construction, permet d’optimiser les chances de succès, et de maximiser les effets bénéfiques d’une rénovation pour toutes les parties prenantes. Le défi est de taille, et les réponses à y apporter nécessitent de rassembler et fédérer toutes les forces afin d’y parvenir. Votre expert immobilier spécialiste de l’optimisation de plans financiers en fait sans nul doute partie !
Philippe Gavin